Chiara Condi, fondatrice de Led by HerPouvez-vous revenir sur votre parcours en quelques mots ?

J’ai 33 ans et je suis italo-américaine. Cela fait une dizaine d’années que je travaille sur la cause des femmes. Mon premier travail était à la BERD (banque européenne pour la reconstruction et le développement) à Londres. On y étudiait l’impact que pouvaient avoir les projets d’investissements pour les femmes. C’est là que j’ai découvert que la cause des femmes était vraiment la cause de ma génération. Il existe encore beaucoup d’inégalités, qui persisteront si on ne fait rien. Mais pour faire changer les choses, il faut vraiment agir de façon proactive et trouver des solutions innovantes.

Cela a été le déclic pour créer votre association ?

Oui. Suite à cette expérience, je me suis mis à mon compte et j’ai créé en 2014 Led by Her. L’association met en œuvre, en partenariat avec deux écoles de commerce - I’IESEG et l’ESCP - un programme d’entrepreneuriat destiné à accompagner la reconstruction professionnelle des femmes victimes de violences. 

Pourquoi avoir choisi d’aider ce public en particulier ?

A l’époque on ne parlait pas de l’impact des violences sur la vie professionnelle des femmes. On ne parlait que des solutions centrées sur l’urgence : trouver un hébergement, des avocats, une aide psychologique… Je suis partie de l’idée qu’il ne fallait pas juste sortir de la violence pour survivre, mais en sortir par l’autonomie et par une nouvelle vie.

L’objectif de Led by Her est d’aider ces femmes à créer leur entreprise ?

Pas seulement. Le but du programme est avant tout de transformer sa vie. On utilise l’entrepreneuriat pour permettre de devenir entrepreneur de sa propre vie. Certaines des femmes accompagnées par Led by Her ont pu obtenir des postes salariés auxquels elles n’auraient jamais eu accès sans ce programme. Il permet en effet d’ouvrir un monde d’opportunités, en offrant de nouveaux outils, de nouvelles compétences et du réseau.

Comment se déroule le programme ?Led by Her

Aujourd’hui, il s’organise autour de 300 heures de cours. Il s’agit de cours d’entrepreneuriat et d’ateliers personnalisés à la création d’entreprise. Il y a également une importante partie de mentorat et de coaching. En effet, nous travaillons beaucoup sur le projet entrepreneurial mais aussi sur la personne : lui apprendre à se connaître, à se trouver… Le parcours comprend également des évènements, tels que la participation à un « hackaton », qui permettent d’avoir un retour sur son projet et de se créer du réseau.

Quel est le profil des participantes ?

Les participantes ont entre 23 et 64 ans. Elles ont des parcours très différents. Leurs origines et leurs milieux socio-économiques sont aussi très hétérogènes. C’est normal : les violences sont un problème social et non socio-économique.

Comment faire si l’on est intéressée par le programme ?

Les participantes peuvent postuler sur notre site web ledbyher.org. Des entretiens individuels et collectifs sont ensuite organisés pour s’assurer de leur motivation. Nous voulons en effet nous assurer que les participantes sont sorties de la phase d’urgence et qu’elles sont dans cette phase de reconstruction. Nous demandons une cotisation annuelle de 500 euros, soit 50 euros par mois, ce qui ne représente qu’une petite partie de la valeur du programme. Une vingtaine de femmes sont accompagnées chaque année.

Quelles sont les actualités de votre association ?

Nous venons de lancer la plateforme FoundHERLab, pour encourager les collaborateurs en entreprise à effectuer du mécénat de compétences pour aider les femmes accompagnées par Led by Her. L’objectif est de travailler avec elles pendant deux jours pour accélérer leur projet et de leur permettre de se créer un réseau professionnel.

 

Propos recueillis par Raphaëlle Pienne (décembre 2019).